le Triomphe de la Liberté – La Rose et le réséda contre le FN
Le triomphe de la liberté (monument central de la place de la Nation à Paris) accompagnée du poème « La Rose et le Réséda » de Louis Aragon.
Ce poème est (malheureusement) d’actualité pour rappeler les valeurs qui nous sont chères celles de la Liberté, du Partage, de la Fraternité, de la Paix et de la Justice. Ne laissons pas le FN nous duper et nous priver à court ou moyen terme de nos valeurs. Allons voter ce dimanche !
La Rose et le réséda
À Gabriel Péri et d’Estienne d’Orves comme à Guy Môquet et Gilbert Dru
Celui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Tous deux adoraient la belle prisonnière des soldats
Lequel montait à l’échelle et lequel guettait en basCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Qu’importe comment s’appelle cette clarté sur leur pas
Que l’un fut de la chapelle et l’autre s’y dérobâtCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles des lèvres du cœur des bras
Et tous les deux disaient qu’elle vive et qui vivra verraCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles au cœur du commun combatCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Du haut de la citadelle la sentinelle tira
Par deux fois et l’un chancelle l’autre tombe qui mourraCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Ils sont en prison Lequel a le plus triste grabat
Lequel plus que l’autre gèle lequel préfère les ratsCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Un rebelle est un rebelle deux sanglots font un seul glas
Et quand vient l’aube cruelle passent de vie à trépasCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Répétant le nom de celle qu’aucun des deux ne trompa
Et leur sang rouge ruisselle même couleur même éclatCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
Il coule, il coule, il se mêle à la terre qu’il aima
Pour qu’à la saison nouvelle mûrisse un raisin muscatCelui qui croyait au ciel celui qui n’y croyait pas
L’un court et l’autre a des ailes de Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle le double amour qui brûla
L’alouette et l’hirondelle la rose et le réséda
Louis Aragon
mars 1943 (repris dans La Diane française, 1944)
source : www.reseau-canope.fr
Le saviez-vous ?
Deux vers qui reviennent sans cesse comme un refrain (« Celui qui croyait au ciel / Celui qui n’y croyait pas »), une histoire de « belle / Prisonnière » (La France) qu’il faut libérer, des mots qui sonnent comme des comptines, proverbes ou extraits de contes populaires… ce poème paraît bien léger. Pourtant il célèbre le courage des hommes qui réussirent à dépasser leurs petites convictions personnelles de religion et de politique afin d’oeuvrer ensemble pour une noble cause : la libération de la France pendant l’Occupation durant la seconde guerre mondiale. Communistes et catholiques se retrouvèrent en effet pour combattre, pour souffrir et pour mourir ensemble dans l’espoir de jours meilleurs. Louis Aragon leur rend ici un hommage dans ce poème écrit en 1943 alors que lui-même était communiste et clandestin.
Ainsi la « rose », c’est le rouge qui symbolise le communiste anticlérical, celui qui ne croit pas au ciel, c’est-à-dire à Dieu. Le « réséda » est au contraire la couleur blanche qui représente la noblesse. Ce poème fut publié une première fois en 1943 puis de nouveau en 1944, cette fois avec la dédicace suivante : « A Gabriel Péri et d’Estienne d’Orves comme à Guy Môquet et Gilbert Dru ». Quatre hommes. Deux communistes et deux catholiques. Tous des résistants, tous morts fusillés par les Allemands.